Bartimée

Bartimée

sens de la vie


Tel qu'un voyageur qui part de grand matin...

En ces jours de confinement un peu sinistres, mais qui peuvent nous donner du temps pour lever un peu la tête de notre quotidien, ce beau poème de Victor Hugo (les Contemplations)

 

Heureux l’homme, occupé de l’éternel destin,

Qui, tel qu’un voyageur qui part de grand matin,

Se réveille, l’esprit rempli de rêverie,

Et, dès l’aube du jour, se met à lire et prie!

A mesure qu’il lit, le jour vient lentement

Et se fait dans son âme ainsi qu’au firmament.

Il voit distinctement, à cette clarté blême,

Des choses dans sa chambre et d’autres en lui-même;

Tout dort dans la maison; il est seul, il le croit;

Et, cependant, fermant leur bouche de leur doigt,

Derrière lui, tandis que l’extase l’enivre,

Les anges souriants se penchent sur son livre.

 

MANESSIER - 1983
La petite source nocturne

MANESSIER - 1983
La petite source nocturne


08/04/2020
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La vie... éternelle ?

Adrien Candiard s'intérroge alors sur ce que peut signifier ( pour ceux qui y croient) l'idée de vie éternelle. En abordant ce chapitre, je me suis demandé où il voulait en venir...

 

La voie ouverte par l’espérance, c’est la possession de Dieu comme salut ; c’est ce qu’on appelle plus communément la vie éternelle. Il serait peut-être temps d’en parler.

 

 Il est temps, car nous n'osons généralement guère nous étendre sur le sujet. Je m'en aperçois en jetant un coup d'œil à mes prédications de ces dernières semaines: je n'en ai jamais parlé directement. Je préfère me rabattre - et dans l'Église, je ne suis probablement pas le seul - sur des sujets plus faciles, qui vont davantage intéresser, il me semble, mes paroissiens ou tous ceux qui ont la patience de m'écouter.

 

Un sujet qui intéresse toujours, par exemple, c'est le bonheur. On peut en parler mal, bien sûr, mais au moins la question est bonne. Tout le monde cherche le bonheur, alors je m'efforce de montrer que la foi conduit au bonheur, que Dieu ne veut que notre bonheur. Et tout cela est vrai. Et naturellement, quand je parle de bonheur, implicitement, je parle de salut: pour moi, les deux sont intimement liés. Mais est-ce bien ce qu'on entend quand je parle? Est-ce que ceux qui m’écoutent ne vont pas entendre par «bonheur » ce que tout le monde, les magazines ou les chansons qui passent à la radio, entendent par là: un sentiment d'intense satisfaction du désir, joint au confort matériel et à une grande sérénité. Alors que ce que j'annonce passe par la croix ! Alors que le salut, s'il est porteur de la joie véritable, n'est nullement une partie de plaisir! Si je voulais être vraiment honnête, je devrais cesser de jouer sur les ambiguïtés, et dire très clairement que, si on recherche l'harmonie avec les éléments, la disparition de toute souffrance ou je ne sais quelle aspiration orientale à la mode, l'Église n'a en fait rien à offrir. En stock, elle n'a qu'un seul produit: le salut, la vie éternelle. Si je laisse entendre que nous avons autre chose, alors je risque de tromper les gens qui m'écoutent.

 

Mais si nous n'osons pas en parler, bien souvent, c'est parce que nous avons l'impression que, par le passé, nous en avons trop parlé et que, pendant des siècles, l'Église s'est trop intéressée à la vie après la mort, et pas assez à ce monde-là ; qu'on a tout renvoyé à plus tard, et à un plus tard à l’existence somme toute incertaine, en oubliant de nous occuper des difficultés de notre monde, qui a pourtant bien besoin de notre engagement.

 

Mais quand je parle de salut, quand je parle de vie éternelle, je ne parle pas de la vie après la mort. En tout cas, pas seulement. Car si elle est éternelle, précisément, elle n'est pas dans le déroulement du temps: elle est hors du temps, ou plus exactement, elle est tout le temps. Maintenant, aussi bien qu'après ma mort quand je verrai Dieu face à face. Si Jésus nous ouvre la vie éternelle, c'est qu'il nous oblige à renoncer à nos frontières entre la vie ici-bas et la vie dans l'au-delà: c'est la même vie! La vie éternelle commence maintenant, et elle se poursuit éternellement. Cela ne veut pas dire que notre vie va se poursuivre toujours à l'identique, et que nous serons condamnés à prendre l’apéritif avec le beau-frère tous les dimanches pour les siècles des siècles; ni que la lecture de ce petit livre se poursuivra même après le Jugement dernier.

 

à suivre..

 

San Clemente de Taül - Catalogne
Reconstitution par "video-maping" de la fresque de l'abside. XII eme siècle.
Le Christ Panthocrator, qui "nous ouvre la vie éternelle"...


13/07/2018
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La parabole de Zachée

Retrouvons une dernière fois les méditations de Zachée dans la nuit

 

 

Sais-tu que je me raconte des paraboles ?

 

Je ne me savais pas ce don-là ; c’est venu en méditant sur les tiennes.

 

Une sur le Juge, précisément. Voici venir l'heure où tout sera accompli; tous les humains de tous les temps sont réunis au pied du trône où l'on attend le Juge.

Crainte et tremblement, comme tu penses.

On attend, on attend, et il ne vient pas. Alors les gens commencent à se fatiguer, les vieux, les enfants, les femmes enceintes. Et certains des plus valides en profitent pour se pousser auprès du trône, être dans les premiers servis, se faire voir, se faire valoir.

Et d'autres, émus de compassion ~ comme tu l’es si souvent - viennent en aide aux défaillants. Mais ils s'écartent, ils s'éloignent, on leur prend leur place. Et ils s'en inquiètent et ils se demandent s’ils reviendront à temps et ils ne cessent pourtant pas d'aider, soigner, nourrir et conforter. Et les voici entraînés loin, loin, hors de la salle superbe et solennelle, et les voici perdus sur je ne sais quelle route, dans le désert.

Alors vient à eux le plus pauvre et le plus dolent des hommes. Et ce pauvre lève le regard et dit : “C'est moi qui suis le Juge, mon frère !”

Et les autres pendant ce temps, attendent, attendent devant le trone vide et qui le restera à jamais.

 

(p 55)

 

 

 J'ai compris! Tu es le révélateur de l'envers du monde.

En cette nuit qui va commencer - oh, puisse-t-elle nous être épargnée - c’est ce qui depuis toujours est caché qui va paraître, le fond, l’en-bas, l'enfer qui est en nous.

Faut-il vraiment passer par là pour que se lève l'autre face ? Existe-t-elle seulement? Car le plus lointain, le plus caché n'est pas l’horreur qui nous habite en secret, c'est le visage de lumière où tout pourra être sauf - ô douleur des vivants, puisque la seule voie qu'on nous offre à ne pas mourir traverse l’abîme de la mort!

 

Je crois bien que tu dis finalement une seule chose, une seule chose, mais tellement profonde que l'oreille humaine n'entend  pas. Et je crois bien que moi, oui, moi, Zachée, je l’ai entendue une seule fois, un instant fulgurant, quand tu levais les yeux vers moi et que tu m'as dit : “Zachée, je dînerai ce soir chez toi.”

 

 

(p 63)

 

 

Maria Laughlin


15/05/2018
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Je suis cet homme tout neuf

J'ai lu avec délectation le petit livre de Maurice Bellet, La nuit de Zachée  (DDB 2003), je voudrais vous en partager quelques passages durant les semaines qui viennent.

 

Jésus s'était invité chez Zachée le publicain lors de son passage à Jericho, quand il montait à Jérusalem. D'après l'évangile de Jean, la tension est devenue si forte à Jérusalem entre jésus et les pharisiens (épisode de la femme adultère par ex) que Jésus s'est replié quelques temps "au delà du Jourdain" (Jn 10), avant la dernière montée vers Jérusalem et sa Pâque.

Maurice bellet imagine qu'il est alors venu dormir chez Zachée. Pendant que le Seigneur dort dans la chambre haute, Zachée se rappelle leur première rencontre, et il parle à Jésus dans son coeur.

 

 

Tu viens. Tu entres. Je me courbe autant que le permet ce ventre rebondi. Tes disciples entrent aussi. Et mes amis. Et des inconnus. Une foule. On s’entasse chez moi. On s’écrase à la porte.

 Tu dis : « Aujourd’hui le salut est venu dans cette maison. Car Zachée, lui aussi, est un enfant d’Abraham. »...

 

Ah, Maître, Maître, je ne puis y songer sans larmes. Comprends-tu? La parole m’était dite, la parole que tout humain attend d’avant sa naissance, la parole qui le justifie d’être né. Oh, vraiment, si j’entends quelque chose à ce qu’ils nomment parole de Dieu - béni soit-il éternellement - c'est par ce que tu m'as dit ce jour-là. Et béni sois-tu, Maître, d’avoir parlé.

 

Depuis, je suis un homme nouveau. Comprends-moi : je ne dis pas que je suis meilleur. Non, je dis : nouveau. Car même s’il me faut toute ma vie - et déjà elle va vers son déclin, aurai-je le temps? - pour m'approcher un peu de ce que tu demandes, et qui est si haut, dès maintenant, je suis cet homme tout neuf, comme l’enfant qui vient de naître. Et sais-tu où est la différence? C'est qu’il me semble qu'à cause de ta parole, plus jamais je ne pourrai désespérer de moi-même. Le sombre abîme est derrière moi, la nuit amère que les humains emplissent de bruit et d'agitation, de cris, de courses et de conquêtes, pour ne pas entendre ce grand silence froid qui monte du fond de la ténèbre.

 

Mais pourquoi te dire ces choses ? Tu les sais infiniment mieux que moi.

 

 

St Nectaire - Puy de Dôme - Eglise du XIIeme de style roman auvergnat
Le chapiteau de Zachée


06/05/2018
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Lorsque j'arriverai au terme du chemin

de  Marcel Perrier

ancien évêque de Pamiers (Ariège), décédé cette semaine

Reflets - Éd. Air libre

 

Lorsque j'arriverai

Au terme du chemin

O mes amis

Fermez

Fermez les yeux

Sur mes faux pas

Oubliez-les

Bien vite

Oubliez-les.

 

Lorsque seront croisées

Mes deux mains dans la mort

O mes amis

Tendez

Tendez vos mains

À l'étranger

Au pèlerin

Bien vite

Accueillez-les.

 

Lorsque seront fermés

Mes deux yeux fatigués

O mes amis

Ouvrez

Ouvrez vos yeux

Sur les beautés

De cette terre

Oh oui

Admirez-les.

 

 

Lorsque seront brisées

Ma voix et mes chansons

O mes amis

Gardez

Gardez les mots

De l'amitié

Et de l'espoir

Oh oui

Rechantez-les.

 

 

 

 

 

 

 


04/10/2017
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