Il allait commencer l'énorme sauvetage.
Ainsi l’enfant dormait sous ce double museau,
Comme un prince du sang gardé par des nourrices.
Et ses amusements et ses jeunes caprices
Reposaient dans le creux de ce pauvre berceau.
L’âne ne savait pas par quel chemin de palmes
Un jour il porterait jusqu’en Jérusalem
Dans la foule à genoux et dans des matins calmes
L’enfant alors éclos aux murs de Bethléem.
Ainsi l’enfant dormait dans son premier matin.
Il allait commencer quelle immense journée.
La robe du soleil, un instant détournée,
Lui versait le reflet d’un manteau de satin. (…)
Ainsi l’enfant dormait dans le règne herbivore.
Et la fleur et la bête autour de lui veillaient.
Et l’enfant reposait dans la faune et la flore.
Et la fleur et la bête autour de lui priaient.
Et ces deux bienveillants autour de lui veillaient.
Il allait commencer quelle immense veillée.
Et ces deux surveillant autour de lui priaient.
Il allait acquitter quelle dette impayée.
Il allait acquitter quelle innombrable dette.
Il allait enrayer l’effroyable dépense.
Il allait apporter quelle énorme recette
Dans le plateau perdu de la double balance.
Il allait regagner l’énorme récompense.
Il allait commencer l’énorme sauvetage.
Il allait nous ravoir notre énorme héritage.
Et nous faire lever l’éternelle suspense.
Il allait nous sauver dans ce commun péril.
Il allait commencer quel immense partage.
Il allait nous gagner quel immense avantage.
Il allait commencer quel éternel avril.
Charles Péguy
Eve
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